Archive pour la catĂ©gorie ‘Philippe Quesnot’

La Mercos’ à Dadd’

lundi 21 septembre2020

Les tempes cendrĂ©es, le cheveu rare, un lĂ©ger relâchement de la sangle abdominale, le geste Ă  peine plus lent, font souvent oublier aux jeunes que nous aussi, Ă  notre Ă©poque, nous Ă©tions de sacrĂ©s rebelles qui se permettaient de parler Ă  table sans y ĂŞtre invitĂ©s, qui disaient « vachement Â» Ă  tout bout de champ, rappelant Ă  leurs parents que le temps de « bath Â» avait disparu avec les dinosaures du musette. Nous avons eu les cheveux longs et gras, des jean’s moulants avec des feux de plancher, des chemises fleuries et  « Woodstock Â» Ă©tait notre rĂ©fĂ©rence absolue en terme de musique…Mais passons Ă  une Ă©poque un peu plus rĂ©cente : dĂ©but des annĂ©es 2000.

Ce jour-lĂ  Frankie avait empruntĂ© la rutilante Mercedes de son père qui lui avait recommandĂ© d’y faire plus qu’attention en des termes qui ne laissaient aucune Ă©quivoque. J’avais bien une poubelle ambulante, mais aurait-elle acceptĂ© de nous porter jusqu’à Ampuis et son Salon de la CĂ´te Rotie?

L’aller fut à l’image des recommandations du père. Pas d’excès.

Comme c’était sur la route, nous avions pris rendez-vous chez HervĂ© et Isabelle Souhaut du Domaine Romaneaux Destezet pour y* dĂ©guster leurs vins. Fallait-il y voir un prĂ©sage? Nous y retrouvâmes Cyril Bordarier et Pierre AimĂ©. La ferme fortifiĂ©e d’HervĂ© Ă  Arlebosc, la dĂ©gustation des rouges et de son deuxième millĂ©sime de blanc, le froid hivernal, la vue superbe sur la vallĂ©e, cet Ă©norme bloc de granit qui sert de table Ă  l’entrĂ©e et sur lequel nous avons bu une MĂ©mĂ© 90 et un chenin 99 de Poirel. EmmitouflĂ©s, le corps au chaud et le nez dans le verre. On aurait dĂ» se mĂ©fier, cela dĂ©marrait trop bien.

Nous Ă©tions en janvier, pĂ©riode particulièrement nĂ©faste Ă  la gente porcine. Quelques jours auparavant, un de ses reprĂ©sentants s’était jetĂ© sur la lame aiguisĂ©e d’un membre de la famille Souhaut. EmbarrassĂ©s par la situation et afin d’éviter tout tracas avec la police, ils transformèrent le suicidĂ© en boudins, saucisses et autres dĂ©rivĂ©s dĂ©lectables. Il nous fut gentiment demandĂ© de participer Ă  la veillĂ©e funèbre. Rapidement nous avons compris que le disparu devait occuper une position hiĂ©rarchique importante tant les bouteilles qui accompagnaient les larmes Ă©taient nombreuses et de toutes rĂ©gions.

La vĂ©ritĂ©, je ne sais plus si nous dormĂ®mes sur place ou bien?.. Toujours est-il que nous constatâmes que nous avions avec le couple de parisiens un deuxième rendez-vous commun, Ă  Tupins-Semons chez Jean-Michel StĂ©phan, Ă  une heure quelque peu identique. Chez Jean-Michel, seule la taille est petite car pour ce qui est du reste, le bonhomme a de la ressource et du talent. Il nous fit dĂ©guster l’ensemble des barriques avant de nous emmener manger pas loin de lĂ  dans un lieu oĂą il souhaitait nous faire dĂ©guster une large palette de Cornas. A ce stade-lĂ , j’avais dĂ©jĂ  la jauge au maximum.

Une fois terminĂ© le tour de France des Cornas, Jean-Michel dit : « Il me semble qu’il y a des barriques que vous n’avez pas goĂ»tĂ©es, celles du fond ! Allez on y retourne ! Â» Tous les cinq dans la Mercedes, c’était Goran BrĂ©govic en vallĂ©e du RhĂ´ne, manquaient que quelques unitĂ©s du sexe opposĂ© et encore. Ce n’était pas vraiment le but de l’excursion et puis surtout on voulait une bonne ambiance, alors…. Les deux kilomètres qui nous sĂ©paraient du restaurant parcourus, Frankie mit au point mort et laissa la Mercedes grimper la petite pente sur son Ă©lan pour aller se garer tout près du poteau en ciment.

A peine immobilisĂ©s,  les portières s’ouvrirent, ne laissant malheureusement Ă  Frankie pas suffisamment de temps pour consulter le manuel d’utilisation et d’y trouver Ă  la rubrique « frein de parking Â» que celui de la Mercedes se situe Ă  cĂ´tĂ© de la pĂ©dale d’embrayage et non entre les deux sièges comme il essayait dĂ©sespĂ©rĂ©ment de l’y trouver.

Il est remarquable de constater comme le bruit d’une portière qui se retourne au contact d’un poteau en bĂ©ton armĂ© a la facultĂ© de dĂ©griser dans l’instant tous les membres d’une assemblĂ©e de joyeux camarades. Les Ă©thylomètres perso furent remis Ă  zĂ©ro. Pas une vanne, pas un jeu de mots, rien. Normal aussi, quand on voit 130kg d’amitiĂ© très, très Ă©nervĂ©e, cette rĂ©action d’éviter les phrases alambiquĂ©es et les mots inutiles. Notre ami sortit lentement, fit le tour, constata les dĂ©gâts, essaya de refermer la portière, d’abord doucement ensuite fermement puis en force. Face Ă  l’échec, il se recula d’à peine un mètre et soudainement mit un violent coup de pompe qui laissa son empreinte dans le mĂ©tal mais eut le mĂ©rite d’obstruer la bĂ©ance.

Un rouleau de bon vieux scotch marron Ă  large bande et deux mètres de corde plus tard, la rĂ©paration faisait illusion. « Dadd’ Â» n’y verrait que du feu. Pendant cinq minutes les pensĂ©es furent au recueillement puis Jean-Michel lança : « Bon on y goĂ»te ? Â» On y goĂ»ta et y goĂ»tĂ»mes, je me souviens très bien que Monsieur StĂ©phan père faisait de dĂ©licieux jus d’abricot et qu’il y avait quelque part dans la cave une ou deux barriques d’eau de feu qu’ils y goĂ»turent, qu’à une heure que nous dĂ©finirons comme avancĂ©e, Frankie et moi fĂ®mes une certaine distance pour trouver un lieu oĂą mettre nos petits corps dans une position horizontale plus appropriĂ©e Ă  notre Ă©tat.

Je vins en aide Ă  mon ami quand le digicode de l’hĂ´tel voulut jouer avec lui Ă  « Questions pour un pochetron Â» lui posant de perfides questions, tel le numĂ©ro de son dĂ©partement et celui de sa carte bleue, que je garde dĂ©sormais prĂ©cieusement. Vers midi, après avoir dĂ©collĂ© nos yeux Ă  l’eau chaude, nous avons pu nous rendre compte, aux trainĂ©es marronnasses qui couraient de leur voiture au bâtiment, que Cyril et Pierre Ă©taient bien rentrĂ©s eux aussi et avaient pu atteindre sans trop de dommage l’un la porte d’entrĂ©e de l’hĂ´tel, l’autre, quant Ă  lui, nous laissa perplexe quant Ă  sa destination finale, le trajet Ă©tant marquĂ© de preuves d’hĂ©sitations multiples et certainement soudaines Ă  en juger par les jolis dessins que l’on aurait dit exĂ©cutĂ©s au pochoir Ă  vomi.

Les premières heures du lendemain matin furent occupées à chercher un carrossier qui accepterait de prendre la voiture et une jolie poignée de billets dès notre retour puis de prévenir Dadd que le séjour se prolongeait quelque peu, ne nous restait plus que 500 kms à faire, dans un blizzard permanent. Voilà comment nous n’atteignîmes jamais Ampuis et comment Frankie s’est fait soulager de quelques belles coupures qui l’encombraient.

* Avez-vous remarquĂ© comme moi cette tendance naturelle Ă  rajouter des « y Â» dans toutes les phrases Ă  l’approche de la rĂ©gion lyonnaise ? On y fait sans le vouloir.

Liste des vins : Domaine Romaneaux-Destezet – Domaine Gramenon – Château de Suronde – Domaine Auguste Clape – Domaine Thierry Allemand – Domaine Alain Voge – Domaine du Tunnel – Domaine du Coulet

Extrait de Trente nuances de gros rouge, aux Éditions de l’Épure, par Philippe Quesnot, Ă©videmment.

Objectif Lune.

mercredi 10 juin2020
Équipé pour la conquête de l'Est

1969 Année Hérétique.

Y poser le pied, telle était l’ambition affichée par la NASA. La petitesse d’esprit ! Quel manque d’envergure ! Sans l’avoir jamais parcourue, moi je la connaissais, je savais tout d’elle, de ses contours émouvants, de sa délicate géographie, imaginant sa partie la plus intime grâce à une iconographie empruntée sur la pointe des pieds au rayon dédié du marchand de journaux. Nuitamment je la célébrais. Sous mon chapiteau improvisé j’en avais dressé d’une main mal assurée de nombreuses cartes détaillées et mis en place un programme d’études ambitieux où la témérité des options techniques retenues pallierait le manque de crédit.

La question du Module Lunaire et plus spécifiquement son mode de propulsion y apparaissait sans objet, absolument vierge de tout usage, les batteries seraient à pleine charge. Le plan de vol était intentionnellement élémentaire, pas question de passer par une phase d’approche via une orbite elliptique aussi inutile que chronophage, mes calculs confirmaient l’option rectiligne, pas de préliminaire, à ce point certain de mon fait qu’aucune correction de trajectoire n’était planifiée. Il n’en était pas de même pour l’approche finale et l’alunissage, j’avais compulsé bon nombre d’ouvrages spécialisés, mais un grand flou subsistait quant à cette phase ultime, souvent évoquée comme un grand mystère.

J’avais dix-sept ans et me sentais très en retard sur le programme habituel des garçons de mon âge. Il arrive un moment où la théorie ne suffit plus, elle doit laisser le pas à la pratique. Peu importaient mes connaissances et la somme de travaux produits, je devais passer à l’action. Les ingénieurs de la NASA ne s’y trompaient pas, qui avaient vu en juillet une fenêtre de tir idéale. D’ici là je devais recruter, sélectionner et retenir celle des filles de mon village qui serait la première spationaute française.
Dès mes dix-douze ans, j’avais inscrit la fille du boucher sur mes tablettes, je nous avais imaginés sillonnant l’espace infini. La température n’excédant jamais les quatre degrés requis, j’aurais carrelé le sol de la navette et répandu quelques poignées de sciure afin qu’elle ne soit pas dépaysée durant notre éternel voyage. Malheureusement je n’ai jamais pu lui exposer mon projet, surveillée en permanence par une mère faisant office de cerbère et un père dont la stature colossale suffisait à me dissuader de toute prise de contact, même furtive.

Pour les autres candidates, je ne sais où j’ai péché ? Le manque de clarté dans la communication ? Ces petits mouvements de bassin pendant l’exposé ? Toujours est-il que courant mai, j’ai compris que le succès de mon entreprise passerait par une délocalisation, je n’avais suscité aucune vocation dans le bourg, seule ma connaissance de la topographie lunaire avait progressé grâce à la poursuite de mes travaux nocturnes.

Une opportunité s’offrit enfin lorsqu’une amie souhaitant rejoindre son amoureux en Tchécoslovaquie me proposa de l’accompagner. Fin des années 60, USA et URSS se livraient une guerre sans merci pour la conquête spatiale, tellement occupés à se surveiller qu’ils ne prendraient garde à ce petit français venu de nulle part. Et si durant ce bel été 1969, déjouant tous les pronostics, l’érection de notre drapeau français sur le sol lunaire se retrouvait à la Une de la presse mondiale grâce à l’ingéniosité et l’opiniâtreté d’un jeune chercheur normand ? J’intégrais discrètement un camp de travail en Moravie où nous posions pour la plus grande gloire du Parti Communiste Tchécoslovaque des bordures de trottoir en granit entre deux villages de montagne.
Woodstock Ă©tait dans l’air du temps, 68 encore tout proche. « Don, partage et amour, mes sĹ“urs ! Aimons-nous sans entrave ! » J’avais les Ă©lĂ©ments de langage. Deux semaines d’un intense lobbying autour des feux de camp et des soirĂ©es guitare n’y suffirent pas, aucune volontaire, zĂ©ro dĂ©collage.

Dans la nuit du 21 juillet, humiliation suprême, sur le seul écran de télévision du village j’assistais en direct à ma défaite dans cette course impitoyable. Les Américains foulaient de leurs pieds immondes l’objet de mon culte.

Sur la route du retour je m’arrêtai à Brno, où pour me remercier, une spationaute suédoise à qui j’avais prêté un prototype de casque mou en feutre me proposa de l’accompagner sur son pas de tir. Échafauder un plan de vol précis dans son bureau d’études, peinard sous ses draps, est une chose, mais improviser au débotté avec de nouveaux paramètres, dans une langue étrangère, nécessite une présence d’esprit qui me fit défaut. Pourtant mise à feu et décollage se déroulèrent sans encombre, c’est lors de la phase ultime d’approche que je perdis le contrôle de ma navette. Émotion et précipitation de novice. Par chance, il ne s’agissait pas là d’un vol inaugural pour ma partenaire. Elle fit preuve de patience dans les manœuvres et guida mon module de si parfaite manière qu’à la fin je pratiquai un alunissage dont elle me félicita ardemment dans sa langue natale.

Aboutir après tant d’années de recherche, de mise à l’épreuve, de doute et d’échecs, prouvait une fois de plus qu’un travail mené avec passion et obstination finit toujours par être récompensé.

Seul regret, la discrétion imposée par la bienséance, ne pas pouvoir le clamer, le crier sur les toits et surtout à travers les rues de mon village.

Mimi, deux ans de confinement strictement respectés.

mardi 14 avril2020

Bon, cela se confirme, le dépôt de bilan de ton blanchisseur nous l’avait rappelé, nous allons boucler une deuxième année sans toi et ton état de santé ne s’améliorant pas vraiment, je crains que tu ne reviennes plus désormais ou alors faudrait que la médecine fasse de sérieux progrès. Nous allons devoir nous y faire.

Tu m’as laissé au milieu du gué, un peu perdu avec ces leçons de vie issues de nos virées, restées sans suite, inabouties, saurai-je en tirer les précieux enseignements et les mettre à profit dans mon quotidien de mangeur-buveur ?

Car peu de gens se rendent compte, même deux ans plus tard, à quel point tu auras marqué de ton empreinte ce vingt et unième siècle naissant. Tes champs d’intervention étaient à ce point vastes qu’il sera bien difficile aux générations futures de faire la part des choses, démêler le vrai du faux, démasquer les usurpateurs et justement te réattribuer tes contributions, tant tes actions touchaient de domaines. J’aimerais modestement contribuer à en établir l’amorce d’un inventaire qui pourrait par des apports extérieurs tendre à dessiner les contours d’une personnalité à facettes multiples.

Dans le domaine de l’art, dire que tu serais l’inventeur du « tachisme » serait exagĂ©rĂ© mais il est incontestable et nous le retrouvons dans sa correspondance, c’est après un voyage dans le Sud de la France et t’avoir rencontrĂ© dans un restaurant de fruits de mer oĂą il Ă©tait attablĂ© Ă  cĂ´tĂ© de toi que Jackson Pollock aurait eu le dĂ©clic, son univers pictural basculant irrĂ©mĂ©diablement. Ce procĂ©dĂ© naturel, tu le rĂ©utiliseras Ă  Moulin Pey Labrie, ton boxer albinos somnolant sous la table bĂ©nĂ©ficiant tout un après-midi des fonds de verre que tu ne voulais plus boire, tu les lui as projetĂ©s mĂ©thodiquement sur le pelage. En fin de journĂ©e, une Ĺ“uvre d’art nous est apparue. Tu venais de jeter les bases de l’art cyno-cinĂ©tique. Cette totale expertise, Glougueule en recherche permanente de talents en devenir, voulait l’exploiter. Ainsi naquit le projet d’une collaboration avec la crĂ©ation du ticheurte prĂ©-bougnettĂ©, chaque semaine nous t’aurions fourni en XXXL, cette taille qui seyait tant Ă  ton petit corps, un par repas, Ă  la fin du mois on en balançait une centaine sur le marchĂ© et ç’eut Ă©tĂ© le D’Jackpot ! Les gastronomes, amateurs d’art, avaient leur Ready Made.

Que dire aussi de ta mĂ©thode de dressage longuement mise au point Ă  travers les gĂ©nĂ©rations de Boxer que tu as Ă©levĂ©es et qui pourrait se rĂ©sumer Ă  : Suite Ă  sĂ©rie d’injonctions prĂ©cises Ă©noncĂ©es clairement, le chien cesse toute activitĂ©, marque l’arrĂŞt, enregistre l’ordre, regarde l’être qui lui a adressĂ© la parole et ordinairement reprend sa besogne consistant Ă  faire ce que la raideur de notre colonne vertĂ©brale nous interdit. Il suffira souvent de quelques dizaines de sĂ©ances pour que le chien, analysant son comportement lamentable, prenne conscience de son attitude dĂ©plorable et comme pour se faire pardonner gratifie son maĂ®tre d’un nettoyage en profondeur de la devanture Ă  grands coups de langue. La mise Ă  niveau en continu est impĂ©rative, sinon les acquis se perdent.


La sculpture, ton domaine, où il fut question un temps, suite à l’exposition d’une de tes œuvres, d’ajouter un 119ème élément à la Table de Mendeleïev, la critique ébahie incapable d’appréhender la nature du matériau que tu avais utilisé, toi non plus d’ailleurs. La brève enquête menée dans et aux alentours de ton atelier n’ayant pu apporter plus de précisions, il fut décidé de n’en rien dire, les experts échappant ainsi à la risée du public. Ton art de la performance n’admettait aucune contrainte, ne connaissait pas de limite. Rappelons que tu es le seul à ce jour à avoir provoqué en combat très singulier un bateau à la frontière entre mer et terre, au bout d’un quai, opposant à la puissance dévastatrice de son beaupré démesuré la seule résistance de la vitre arrière de ta voiture. Constat à l’amiable fut établi afin de fixer cette action chevaleresque. Les Surréalistes t’auraient applaudi.

Pour aborder un des sujets qui nous intĂ©ressaient, la cuisine, qui n’a pas assistĂ© Ă  la prĂ©paration de ta Bouillabaisse ne peut imaginer la complexitĂ© de cette recette, la variĂ©tĂ© des poissons, certains ne pouvant, selon toi, s’attraper qu’à la carte bleue, leur ordre d’entrĂ©e dans la danse, dĂ©fini par leur durĂ©e de cuisson. Tout ceci n’importe quel livre de recettes mĂ©diterranĂ©ennes vous le dira mais le secret serait leur prise de contact avec le bouillon. Distance, puissance, les impĂ©ratifs Ă  respecter. Munis de cirĂ©s, nous sommes quelques-uns Ă  t’avoir assistĂ© lors de cette phase pĂ©rilleuse, te fournissant en poissons que tu lançais avec une prĂ©cision aussi approximative que mĂ©tronomique dans l’immense faitout, projetant sur les murs alentours l’excĂ©dent de bouillon. MĂŞme approche pour les calamars, les supions et toute cette bande d’encornets, bien des parois de maisons amies en gardent Ă©ternellement la trace. Cette dernière technique de cuisson dĂ©nommĂ©e « Wok in pro-graisse Â» en raison de l’utilisation de cet ustensile de cuisine ou de tout autre capable d’arroser les surfaces alentours. Et cette idĂ©e gĂ©niale d’utiliser le gras de jambon comme voile protecteur des verres de lunettes. Est-ce Boussac ou Afflelou qui y ont pensĂ© ? HĂ© ben non, lĂ  encore c’est notre Mimi.

La cendre, adjuvant indispensable de toute Ă©ternitĂ© pour l’obtention de lessives d’une parfaite blancheur. GĂ©nial, tu l’as intĂ©grĂ©e bien en amont, n’oubliant jamais d’utiliser la qualitĂ© dissolvante de l’alcool distillĂ© pour apprĂŞter le tissu. Cette Ă©tude sur le long cours a fait l’objet de nombreuses investigations comparatives chapeautĂ©e par un haut comitĂ© scientifique rĂ©uni sur ta terrasse. Question liquide, on peut dire sans crainte d’être contredit que tu as Ă©tĂ© le maĂ®tre-Ă©talon de la volatile, capable sans sourciller d’ingurgiter des potions labellisĂ©es « intorchables Â» par tout autre mortel. Seul un certain Ledoux, sous couvert de nous faire accĂ©der au Nirvana des vins nature nous avait attirĂ©s au fin fond de sa campagne pour nous faire gouter une extraordinaire cuvĂ©e dont il avait raflĂ© les dernières bouteilles chez le vigneron. La description qu’il nous avait faite du nectar avait suffi Ă  nous convaincre de faire le voyage. Alors qu’il tombait en pâmoison, nous inondant d’adjectifs plus superlatifs les uns que les autres, je t’invoquais Mimi et croyais Ă  une mauvaise blague dont tu aurais Ă©tĂ© l’initiateur.

Quelle tristesse que tu ne sois plus là, j’aurais eu plaisir à te le présenter, vous fussiez devenus amis illico.

On passe Ă  20

mardi 31 décembre2019

A minuit tout passe Ă  20

 

Onze ans avec une inflation des prix Ă  zĂ©ro par les temps qui courent, alors que la dette française a rĂ©cemment franchi le cap symbolique de 100% du PIB, qui peut s’en vanter ? Oui qui Ă  part Glougueule ? Nous avons tenu bon pendant plus de dix ans sans une seule fois augmenter nos tarifs. Jeunes et fougueux, emportĂ©s par notre folie crĂ©atrice, nous n’avons jamais pensĂ© Ă  thĂ©sauriser, cigales Ă©perdues que nous Ă©tions.
Les EPHAD possĂ©dant une carte des vins digne et une cuisine de famille, non seulement sont rares, mais hors de prix. Un instant nous avons fondĂ© de grands espoirs sur notre GĂ©gĂ© BossĂ©. Allait-il nous installer une maison de retraite sur les bords de Loire en lieu et place de feues Les Tonnelles ? Malheureusement le bougre reste fringant et ne lâche rien. De maigres retraites nous prĂ©disent un triste avenir, alors afin de nous Ă©viter une fin lamentable faite de chasse-cousin et de minerai grattĂ© sur des carcasses d’animaux abandonnĂ©s nous allons Ă  contre-cĹ“ur procĂ©der Ă  une augmentation de nos prix de vente au 1er janvier 2020. Grâce Ă  vous, nous boirons et mangerons « sain Â». Nos systèmes digestifs vous en remercient par avance.

Etoile rouge

mardi 12 novembre2019

S’il y a bien un truc que déteste mon associé, c’est que j’en fasse moins que lui et il faut reconnaitre que depuis ma déconnexion définitive du monde du travail en mars 2017, je n’en secoue pas lourd, le prunier est intact, nulle trace sur l’écorce. Alors pour me relancer, il lui arrive de me jeter sous le nez un appât, comme ça pour voir. Sa précédente tentative je m’en gausse encore. Cette photo en d’autres temps m’aurait fait choir du hamac, au milieu d’une grande assiette blanche trônait un rogaton de je ne sais quoi, couronné d’une miséreuse feuille d’un végétal anonyme et pour occuper le désert de porcelaine qui menait de cette ridicule bouchée au bord de l’assiette le cuisinier avait dessiné le plan d’évacuation d’un trait de balsamique qui me rappelait fortement mon défunt chat malade. Insuffisant pour que je retourne au turbin, la sieste perpétuelle retenait encore toute mon attention.

Avec son dernier essai le bougre s’est montré plus malin, « exception n’est pas coutume » dit le proverbe Berbère. Au cours d’une conversation téléphonique il me glisse en tout bien tout donneur le conseil d’illico pesto filer chez mon libraire me procurer la B.D. collective « On a mangé sur une île », m’assurant que je saurai y trouver matière à plaisir et réflexion profonde, qu’il y est question d’amis dessinateurs narrant par le menu l’histoire de ce restaurant mythique, aujourd’hui disparu et tant pleuré, un étoilé Michelin atypique tenu par un couple dont les idées politiques étaient jusqu’ici assez peu représentées dans le milieu. « Les Tonnelles » c’eût pu être tout aussi bien « Bâbord Toute ! » ou « L’Etoile Rouge ».

L’île de Béhuard, les Tonnelles, Catherine et Gérard, les soirées de la Dive où tu pleures la première fois parce que tu ne sais pas qu’il faut réserver et tu finis dans un restau quelconque du centre d’Angers. Les années suivantes moins benêt tu es du nombre et doucement démarre une histoire d’amitié que la faible fréquence installe dans le temps long. 2007, La Loire en crue, tout comme nous au petit matin, notre déambulation le long du fleuve, Gégé au retour du marché, les huîtres sur la terrasse ensoleillée, puis un Clos Rougeard 2005 sur le fruit, un deuxième pour vérifier. One more time Eugène !

En 2014 Ă  Angers cette fois, les mĂŞmes Ă  peu de chose près, ça s’appelle Une Ă®le et on refait tourner le manège, pas besoin d’agiter la queue du singe. Et les ris de veau de GĂ©rard. P…. ! J’allais les oublier les ris de veau. Mon D… quel souvenir ! Les fins de soirĂ©e, lorsque fourbu il vient nous rejoindre pour un solo de gamay et qu’en chĹ“ur on dĂ©gomme une dernière bouteille que Catherine a judicieusement sĂ©lectionnĂ©e pour sa fraicheur nocturne, fin de session chez « Red Note », chacun range son instrument plus ou moins dans son Ă©tui ou pas loin. Il y a GĂ©gĂ© mais il y a aussi et surtout Catherine, la Reine de l’accord mets et vin irrĂ©prochable, toujours dans le tempo du moment, la colonne vertĂ©brale de l’établissement, reine et rĂ©gente, tout Ă  la fois.

C’est page 76 que j’ai trouvé le « ce, du comment du pourquoi » Toto m’en avait fortement recommandé la lecture, cette case trônait au milieu du stripe : « Et l’esthétisme d’une assiette, c’est important demande Camille Jourdy, l’autrice de cet épisode. Et là Mon Gégé keskidi ? Hein ! Keskidi ? : « Ah moi je dis toujours « Notre objectif, il est pas là, c’est une dérive de la cuisine, tu balances trois fleurs et tout le monde dit « Waou ! » Pfff ! Ça m’agace. »

Non, mon Gégé, pas tout le monde. Moi aussi ça m’agace, et agacer est un euphémisme à bas coût pour exprimer la rage qui me monte au ciboulot et m’enfume le cervelet lorsqu’un serveur dépose devant moi une ration de station thermale enluminée de pétales pour masquer l’indigence de l’assiette. P…. ! Ça me rend fou, j’ai l’injure au garde à vous, en attente à la commissure des lèvres. Rien à voir avec chez vous. Parce que quand tu sors de table chez les Bossé, c’est uniquement guidé par ce sentiment ténu qui te rappelle qu’il est bien tard, que tes dernières analyses sont très moyennes, que nos amis sont certainement fatigués, et pas pour te précipiter sur le premier casse-dalle venu comme cela t’arrive parfois tant les portions étaient congrues. Dommage qu’Angers soit si loin.

Récemment Catherine et Gérard ont donné un gros coup de gouvernail, le 9 Rue Max Richard est devenu tout à la fois une table d’hôtes, presqu’une cave, presqu’une épicerie, presqu’une galerie, enfin une presqu’île quoi. Nous réservons dès maintenant une table pour la soirée précédant La Dive 2020. Catherine tu notes, s’il te plaît ?
Presqu’île – 6 Rue Max Richard – 49100 Angers – TĂ©l 02 41 19 14 48

Il est trop tard pour tutoyer la gastronomie étoilée des Bossé, mais vous pouvez la retrouver et prolonger ces instants à travers la B.D. éditée chez Delcourt sous les crayons d’une huitaine de dessinateurs et trices, Zeina Abirached, Baru, Fred Bernard, Claire Braud, Etienne Davodeau, Camille Jourdy, Philippe Leduc et Tanquerelle, pour un prix inférieur à 20€. Donc…………..

La Dégust’ au Château de Roquefort le lundi 4 Novembre à Roquefort La Bédoule

mercredi 30 octobre2019

La Aïl Tech a Las Vegas et son C.E.S, le livre sa grande foire à Hambourg, Genève c’est l’automobile. Les Gars ! Il y aura désormais l’Affiche du Vin à Roquefort-La-Bédoule. Roquefort-la-Bédoule, cela ne vous rappelle rien ? Colette Renard ? les nuits d’une demoiselle ? Tu me rockes fort la bédoule ? Hé bien elle a écrit cette chanson en pensant à ce village, enfin je crois.
De cette fine analyse, nous avons déduit qu’il serait judicieux d’accepter l’invitation de Gladys et Maturin à participer à leur nouvelle édition de « La Dégust’ » qui aura lieu au Château de Roquefort, chez Raimond de Villeneuve le lundi 4 novembre à partir de 10h. Nous profiterons de cette occasion pour présenter « en vrai » au Monde ébahi nos deux dernières productions, déjà disponibles sur notre site, à savoir : de mon kamarad de jeu préféré, « De toute Beauté » en collaboration avec le tandem Anne et Jean-François Ganevat et L’ »Agence de Boivages » Numéro 2 somptueusement réalisée par Yves Got.


La chasse au Baru

mardi 22 octobre2019

Quatre nouveautĂ©s dans nos rayons. HervĂ© BarulĂ©a, dit « Baru » est un ami cher, prof de gym dans un passĂ© lointain et donc Ă  mĂŞme de savoir ce qui est bĂ©nĂ©fique pour la santĂ© et idĂ©al pour modeler le corps. Tout comme nous il a optĂ© pour le gamay et pratique le plus souvent possible ce noble art. Nous le sollicitons rĂ©gulièrement pour amĂ©liorer nos performances et enrichir notre fonds « affiches ». En attendant un prochain grand format, nous reprenons en 30×40 le splendide dessin qui illustrait un slogan gĂ©nial trouvĂ© pour un membre de notre Ă©quipe, trop modeste, il souhaite rester anonyme. Trois autres affichettes en 30×40 dont une en partenariat avec Alexandros Rallis de Profil Grec et deux exxxcellentes nouveautĂ©s signĂ©es par mon associĂ© prĂ©fĂ©rĂ©, Michel Tolmer.

Une affiche avec beaucoup de volatile

mercredi 18 septembre2019

Dès les premiers stripes du « Baron Noir Â», j’étais conquis, emballĂ©, subjuguĂ© par cette bande dessinĂ©e, fruit de la collaboration de RenĂ© PĂ©tillon et Yves Got parue initialement dans l’Echo des Savanes en 1976 et poursuivie en 1978 dans le Matin de Paris.
L’humour et la finesse de Pétillon, alliés au trait puissant, au graphisme ébouriffant de Yves Got, six volumes édités, achetés dès leurs sorties, conservés pieusement dans ma bibliothèque idéale.
Première prise de contact avec Yves Got en 1978 au salon de la B.D. à Hyères. Au cours de la dédicace, je me garde bien de lui exposer le projet d’une éventuelle collaboration, sachant qu’avec les artistes il faut préalablement à tout partenariat avoir installé un climat de confiance qui ne peut se faire que sur la durée. En parallèle je me dis, dans le futur, lorsque j’aurai rencontré Toto, nous devrons absolument solliciter Yves pour cette série naissante de une affiche « Glougueule – Agence de Boivages » brillamment entamée avec Jacques de Loustal. Nous laissons donc passer trente-deux ans avant un repas d’affaire au Baratin en 2010, repas au cours duquel nous ne parlons toujours pas de ce qui nous intéresse, trop occupés à vider les quilles de Pinuche et nous délecter de la cuisine de Raquel, mais le courant avec le gamay et le chenin étaient passés entre nous. Nous avons mis à profit les années suivantes pour échanger des courriels, des cartes de vœux et nous attabler quelques fois pour aborder sur la pointe des pieds le sujet de l’éventuelle participation d’Yves à notre aventure Glougueulesque. Notre retraité, vélocipédiste parisien heureux, hésita un moment avant de remonter sur le cheval mais après notre dernière réunion chez Massale, notre fougue communicative de jeunes éditeurs aux dents cariées et notre sincérité d’esthètes alcooliques ont fini par l’achever.

Vous avez donc devant les yeux le tiseur d’une crĂ©ation qui aura coĂ»tĂ© 41 ans d’approche. Sortie « officielle » de cette coproduction vers fin septembre-dĂ©but novembre…

 

 

Glougueule va encore ralentir le tempo.

dimanche 11 août2019

Hallucination ligérienne

Seuls les plus anciens d’entre vous auraient pu déceler après une étude aussi minutieuse qu’approfondie une baisse sensible de notre activité durant la deuxième quinzaine d’août, le nombre d’articles passant sensiblement sous la barre de l’unité. Pourtant cela va être le cas.
Les dégustations, les salons, les repas d’affaires, tout ceci est exténuant et nous ruine la santé. Contraints, nous allons devoir ralentir et la boutique va suspendre son activité jusqu’à la fin du mois.
Il se pourrait que nous vous revenions un peu plus actifs.
Bonnes vacances Ă  vous tous.

Les Cols du Vin Ă  Albiez-Montrond le 28 Juillet

jeudi 11 juillet2019
Nous irons Albiez, s'il le faut.

Albiez, Ă  cheval ou en voiture. Huhuhu! Quelle drĂ´litude ces gens de Glougueule, quand mĂŞme.

J’ai migré dans mon bureau au sous-sol, ce début juillet est insupportable. Nous sommes assommés par des températures jamais rencontrées, cette canicule me pousse vers l’excès, là à quelques mètres, notre cave toute proche. A ce rythme, je ne passerai pas l’été ou l’on me retrouvera enseveli sous les cadavres. En me triturant le bulbe, je me suis souvenu que Toto m’avait envoyé une superbe affiche évoquant le frais des montagnes et symboliquement Ursula Andress sur la double page centrale du numéro du magazine LUI de mai 1966.
Marcel Richaud a l’excellente idĂ©e de renouveler l’expĂ©rience de l’an dernier : vĂ©rifier le phĂ©nomène de l’accĂ©lĂ©ration du vieillissement en altitude. Pour ça il lui faut des pointures, tant chez les vignerons que parmi les dĂ©gustateurs. Bien sĂ»r Glougueule a tout de suite rĂ©pondu prĂ©sent, nous mettrons notre savoir et notre expertise Ă  sa disposition, bien qu’il ne nous l’ait pas demandĂ©. Nous ne nous consacrerons qu’Ă  cette tâche, exclusivement, et subsĂ©quemment pas de stand avec vente de nos magnifiques affiches et livres tous plus intĂ©ressants les uns que les autres, nous resterons concentrĂ©s.
Une vingtaine de vignerons auront fait le voyage en Terres Savoyardes le dimanche 28 juillet de 11h à 19h dans le magnifique village d’Albiez-Montrond.