Archive pour octobre 2010

Compartiment Pochetron

samedi 23 octobre2010

Il arrive parfois qu’en certains lieux l’on ne se sente pas Ă  l’aise, pas Ă  sa place, dĂ©calĂ©. C’est Ă  cet effet que Cyril BORDARIER du Verre VolĂ© vient de crĂ©er un nouvel espace dans son Ă©tablissement,  entièrement dĂ©diĂ© aux buveurs. Au fond et en contre-bas de quelques marches, l’endroit semble anodin. Quelques tables et chaises, une banquette, une affiche au mur sont les seuls objets. Un cotĂ© zen pour une boivitude Ă©purĂ©e.

Comme me le disait Yves COPPENS  : « Il est remarquable de constater que 17000 ans plus tard, Cyril ait reproduit le strict schĂ©ma de Lascaux. Ce lieu au fond de la grotte, « le diverticule des fĂ©lins » oĂą l’on a retrouvĂ© des graffitis et de nombreuses traces de repas et de boissons Ă  base de cĂ©rĂ©ales fermentĂ©es, était contrairement Ă  tout ce que l’on a avancĂ© jusqu’ici, un lieu rĂ©servĂ© aux chasseurs qui s’y rassemblaient le lundi après leurs durs week-ends passĂ©s Ă  la chasse. »

TĂ©mĂ©raire serait le novice qui s’y aventurerait sans un minimum de biscuit. La pièce aux dimensions irrĂ©gulières et l’escalier, unique issue, en forme de goulet dĂ©sorienteront le bobo Ă©garĂ©, contrairement au buveur aguerri qui grâce Ă  son ordinateur de bord habituĂ© Ă  recalculer en permanence les trajectoires rĂ©ajuste aussi les volumes.

Ce « compartiment pochetron » nous nous y sommes installĂ©s lundi dernier. Après quelques amuse-bouche en salle d’attente, nous avons pris le 14h30 sur invitation de Benoit du Jeu de Quilles. Etaient dĂ©jĂ  installĂ©s une bonne demi-douzaine de voyageurs qui se prĂ©chauffaient au Bourgogne Grand Ordinaire de Nicolas VAUTHIER. Juste le temps de dire au revoir Ă  quelques amis du Chateaubriand et du Baratin venus sur le quai nous faire un dernier signe de la main, le train de la soif s’Ă©branlait. Première bĂ»che : Fleurie 2009 en magnum de l’Yvon METRAS. Une approche du langage universel, tous ces gens en rĂ©sonnance avec le gamay parlaient la mĂŞme langue, ponctuĂ©e de claquements sur le palais à la manière inuit.

Deuxième bĂ»che : MĂ©mĂ© 2000 en magnum itou. Depuis une quinzaine d’annĂ©es que je pratique le domaine je peux avouer sans honte que des MĂ©mĂ©s j’en ai sĂ©duites quelques unes, mais celle-ci fait vraiment partie des plus affriolantes. Du fruit, un nez de grenache exubĂ©rant, de la persistance en bouche : une pure gourmandise. Avec de telles bouteilles on atteint rapidement le pays des derviches buveurs. Une douce langueur vous Ă©treint (de marchandises)***, vous essayez de prolonger l’instant, mais on vous annonce que suite Ă  un arrĂŞt de travail d’une certaine catĂ©gorie de personnel, le train n’ira pas jusqu’au terme du voyage, que les impĂ©ratifs horaires vous contraignent de quitter vos camarades de jeux pour rejoindre comme vous le pourrez vos pĂ©nates azurĂ©ennes. Alors dĂ©pitĂ©, le coeur en berne vous les embrassez chaleureusement en vous promettant bien lors de la prochaine remontĂ©e dans la capitale d’aller regoĂ»ter leur cuisine et vĂ©rifier l’Ă©tat sanitaire de leurs caves. Les voyages ne forment pas que la jeunesse, ils apaisent aussi les plus tous jeunes des angoisses Ă  venir.

*** : je tiens Ă  prĂ©ciser que ce gag m’a Ă©tĂ© offert par Michel TOLMER.

Gamay over

mardi 12 octobre2010

Partout dans le monde, hier soir, on a ouvert du Marcel Lapierre. Et partout dans le monde, on s’est réveillé ce matin avec une belle gueule de bois. Pas celle de l’excès bien sûr, puisque Marcel faisait du vin qui le permettait. Celle du manque. La douloureuse nouvelle s’est propagée comme une traînée de poudre en pleine vendange. Silence. Arrêt de fermentation. Le sacré feu de Marcel Lapierre s’est éteint. On a du mal à croire qu’un bonhomme comme ça ne soit pas immortel…

Ce n’est jamais juste de perdre un papa. Il l’était un peu pour nous tous. Pour les milliers de gens qu’il a poussés à la boisson. Pour les centaines de vignerons chez qui il a éveillé une vocation. Combien ont avoué avoir tangué en mettant le nez dans son vin ? En une gorgée, on basculait du côté obscur, celui du vin plus pur qui allait vous mener la vie dure. Mais il était là pour guider les pas. Le premier posé chez lui, on ne l’oublie jamais. Le bonhomme grognon qui te dit qu’il n’a qu’un quart d’heure à t’accorder. Tu t’assois où il t’a dit. Les heures filent et les bouteilles s’empilent. « Reviens demain. On a pas assez parlé. » Quand Marcel vous adoptait, vous vous sentiez tout petit. S’il lisait en vous la soif, il aimait propager la bonne parole et verser son vin. Il causait pour la cause. Et avec les bons mots. Il te racontait qu’il avait fait sulfiter son père en sortant de l’école, qu’on apprenait les conneries là-bas, qu’avant, les agriculteurs n’attendaient pas seulement après le raisin pour vivre, et qu’alors, c’était moins grave de louper une cuve. Il savait qu’il fallait avancer groupé si on voulait prendre le risque de la monoculture version nature. Alors il a fondé une famille qui s’est propagée dans tout le pays. Elle le pleure aujourd’hui.

A Marie et ses enfants

Secrets de beauté

mercredi 6 octobre2010

Bien souvent il nous est arrivĂ©, Philippe Quesnot et moi, de sentir un regard admiratif se poser avec insistance sur notre visage, et de deviner cette interrogation informulĂ©e : d’oĂą vient le veloutĂ© de leur teint de pĂŞche (de vigne), Ă  quels mystĂ©rieux cosmĂ©tiques doit-on attribuer leur carnation si attractive, quelque part entre l’Ă©leveur corrĂ©zien et le marin-pĂŞcheur sibĂ©rien?

C’est pourtant simple, et vous auriez dĂ» vous en douter, chez des ĂŞtres aussi ennemis de l’artifice que nous, seuls les produits naturels ont leur place : GAMAY, notre produit de beautĂ©, bien sĂ»r, mais aussi, tout simplement la crème AVINE, en applications rĂ©gulières.

Si vous aussi, vous voulez développer une belle couperose, signe de bonne santé, faites comme nous : AVINE crème midi et soir.

Les Etats d’âme du Mas Jullien 1998

samedi 2 octobre2010

Cette magnifique tranche, bien Ă©paisse, de thon que venait de m’offrir un ami pĂŞcheur me fĂ®t immĂ©diatement penser Ă  la cuvĂ©e Les Etats d’Ames 1998 du Mas Jullien. J’imaginais très bien une ratatouille compotĂ©e et rĂ©duite Ă  souhaits que l’on aurait Ă©laborĂ©e comme il se doit, en cuisant chaque lĂ©gume sĂ©parĂ©ment, allier sa palette aromatique Ă  la puissance et au fruit de cette bouteille dont la soeur ainĂ©e m’avait laissĂ© un souvenir marquant : ( En deux mots : Humm! Ouahh!, mais avec en plus la suavitĂ© que le temps peut apporter).

Un tour vite fait sur le marchĂ© pour acheter aubergines, tomates, poivrons et courgettes, ensuite attraper mon amoureuse et la convaincre de l’urgence de concocter cette ratatouille dont Elle SEULE dĂ©tient LE secret. Laisser refroidir et attendre qu’arrive l’instant de la grande faim. Pour le thon, saisir, garder le cĹ“ur presque cru, saler et poivrer du moulin. Une carafe est prĂŞte au cas oĂą la demoiselle aurait besoin d’oxygène. J’opère dĂ©licatement le tirebouchonnage, le vin est d’une couleur intense et au nez c’est  AAAAAAAAaaaaaaaaaaaaaaargh! Gasp! Diantre! Damned! P…. de B….. de M….! C’est pas possible! Il y a un bouchon. Comme dans Tex Avery, je me lĂ©zarde et tombe en mille morceaux, le coeur brisĂ©.

J’ai bien tentĂ© de la rĂ©animer par un violent passage en carafe,  j’ai mĂŞme rincĂ© celle-ci au porto en espĂ©rant un Ă©lectro-choc. Que nenni, rien du tout. Je suis effondrĂ©. Par bonheur notre cave renferme d’autres bouteilles susceptibles d’accomplir l’accord avec ce plat, mais je m’Ă©tais fait une joie Ă  l’idĂ©e de boire cette ultime bouteille, lĂ , maintenant. La dĂ©ception passĂ©e, j’ai dĂ©cidĂ© que nous ferions la daube la plus meilleure de la galaxie.

Les grands vins ne meurent jamais.