Archive pour avril 2014

Ma paire de NĂ©vromes.

lundi 28 avril2014

Cela faisait bien longtemps que j’entendais ma fiancĂ©e me reprocher affectueusement une forte consommation et m’inviter Ă  rĂ©server mes dernières ardeurs. J’invoquais Glougueule, son haut-dĂ©bit, de mauvaises influences, que je n’étais pas seul Ă  boire ces bouteilles, que j’en connaissais des maigrelets, des rougeots dont la section Ĺ“sophagienne laissait songeur au regard de la mienne, enfin toutes ces sortes de choses et d’autres encore plus lâches.

Afin de la rassurer j’acceptais de consulter. Les recherches de fuite chez l’urologue n’ayant abouti à rien, je relançais les dés et filais droit à la case gérontologue. Chez lui chaque visite se devait de commencer par le rapport circonstancié de mes incursions à travers le vignoble avec liste de tous les bons plans resto puis, si de la salle d’attente aucun grondement de mécontentement ne s’élevait, aucun vent de révolte ne soufflait, il s’occupait vite fait de ma petite santé. A l’évocation de ces voyages en vignes inconnues, je voyais toujours au fond de ses yeux briller une lueur d’envie et une autre d’agacement à la lecture de mes bilans sanguins, qu’il a toujours soupçonnés provenir de mon sportif de fils. « Punaise ! Comment tu fais ? Les gamma GT sont nickel. T’as une combine ?» Non, rien, aucune explication. Généralement je repartais en oubliant de lui poser les questions importantes qui m’avaient amené à le consulter.

morgonLa véritable raison n’a été entrevue que très récemment. Au lever j’avais un peu plus mal aux pieds que la veille, quand d’autres se plaignent de la tête, la sensation douloureuse d’avoir une paire de Lego incrustée. Sur cette plage de sable fin avoir la chance à chaque pas de marcher sur ces deux seuls galets, qu’ils se logent juste entre les phalanges trois et quatre et vous procurent une douce sensation de brûlure intense.

L’homme de l’art, podologue de son état, s’exprima  à peu de chose près en ces termes «Monsieur, le névrome de Morgon est rare chez l’homme et plus encore à chaque pied. Et bien ne cherchez pas plus loin, la nature vous en a doté d’une belle paire. L’intervention s’impose.»

Ben tiens, voilà la belle affaire, comme si j’avais besoin de me faire inciser les pieds façon gigot d’agneau pour découvrir qu’à en boire tant je ne pouvais qu’être victime de détournements sur le trajet.

On devrait immanquablement, après un minimum d’investigation, y découvrir tapies à quelque endroit de mon parcours sanguin, équipées de matériel sophistiqué, embarqués sur des vedettes rapides, des « choses » détournant à leur profit dans des jerrycans plastiques une grande partie du gamay que je destine d’ordinaire à mes entrailles.

Ou bien alors cela laisserait la porte ouverte à une autre hypothèse qui, dans cette éventualité malgré tout fort peu probable, me destinerait à une autre spécialité de la médecine. Je n’envisage pas d’y croire.

NĂ©vrome de Morton :

Le nĂ©vrome de Morton (Ă©galement nommĂ©e maladie de Morton ou mĂ©tatarsalgie de Morton1), est une formation pseudo-tumorale siĂ©geant sur un trajet nerveux Ă  la face plantaire du pied. La zone concernĂ©e est une zone d’anastomose entre les deux nerfs responsables de la sensibilitĂ© de la plante du pied : nerf plantaire mĂ©dial et nerf plantaire latĂ©ral. Elle est l’une des plus vues en consultation de mĂ©decine gĂ©nĂ©rale, d’ostĂ©opathie et de rhumatologie.

Thomas G. Morton décrit en 1876 « une affection douloureuse de la 4e articulation métatarsophalangienne »2 en rapport avec des filets nerveux coincés entre les têtes métatarsiennes.

 

Rubis my dear

mardi 22 avril2014

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Se promener sur l’Ă©troit fil de l’honnĂŞtetĂ©, promettre sans s’engager, vanter sans connaĂ®tre, parler pour ne rien dire, tout ça mes Ă©tudes me l’ont appris. Comme tout un chacun, il y a sur le parcours des changements de direction possibles et j’ai eu il y a une trentaine d’annĂ©es cette opportunitĂ©. J’ai choisi Ă©picerie, politique nĂ©cessitant des qualitĂ©s morales dont je n’envisageais pas de me sĂ©parer. Alors quand l’ami Tolmer m’a demandĂ© s’il Ă©tait possible que nous fassions un article pour l’ouverture du Rubis au 14 de la Rue LĂ©opold Bellan Ă  Paris 2 avec le 09 84 39 42 49 pour tĂ©lĂ©phone, j’ai rĂ©pondu « Laisse! Ça je sais faire. Je vais nous le vendre le resto des Kopines ». Et hop! C’est parti.

Depuis quelques jours s’est donc ouvert dans le quartier Montorgueil, tenu par GĂ©raldine et Marie, un tout beau cafĂ©-restaurant dont le nom est Ă  lui seul Ă©vocateur de scintillements beaujolois. Et certes, d’après les premiers rapports de nos enquĂŞteurs, la carte des vins y serait du meilleur glou (Arena, Jean-François Nicq, Nicolas Vauthier…). Mais avant l’heure oĂą les grands fauves vont boire, le Rubis a d’autres rendez-vous Ă  proposer :

RV N° 1 : « Mamma mia ! », s’exclame les yeux mi-clos dans le soleil matinal l’heureux mortel qui vient de dĂ©couvrir l’espresso de la Maison GiamaĂŻaca. GĂ©raldine et Marie ont fait le voyage initiatique Ă  VĂ©rone pour recevoir l’enseignement d’el grande Maestro del caffè Gianni Frasi. Elles en ont rapportĂ© tous les secrets du cappucino, du lì per lì ou du latte macchiato. Mais franchement, pour le cafĂ©, est-ce que tu t’aurais fiĂ© Ă  quelqu’un d’autre qu’Ă  un Italien ?

RV N° 2 : Après un verre de P’tit Blanc de Puzelat pour chasser la poussière, Marie envoie harengs-pommes Ă  l’huile, asperges vertes soulignĂ©es d’un trait d’huile d’olive grecque, bavette Black Angus Ă©cossais ou veau confit fenouil-citron, avant conclusion en beautĂ© avec la tarte au citron ou le pot au chocolat de GĂ©raldine.

RV N° 3 : Comme tout cafĂ© qui se respecte, dans un souci d’Ă©clectisme et de tolĂ©rance, le Rubis reste ouvert aux soifs de l’après-midi, qu’elles s’Ă©tanchent avec un jus de fruits d’Alain Milliat, un thĂ© ou une infusion de la Maison Løv ou une bière pression, ou qu’elles anticipent sur l’heure du spritz.

RV N° 4 : Le soir descend et le client aussi, un cocktail, une bulle des Jousset ou un verre de Raisins Gaulois de Lapierre accompagnĂ©s d’assiettes apĂ©ritives puisĂ©es aux meilleures origines : picodon ou saucisson d’Ardèche, coppa, jambon San Daniele ou burrata. En terrasse, les fesses bien calĂ©es dans les chaises scoubidou ou dans la douce lumière de la salle, les paroles peuvent s’Ă©changer autant que les bouteilles, et les amis se retrouver jusqu’Ă  crĂ©er une vĂ©ritable mĂŞlĂ©e de Rubis. Enfin, deux soirs par semaine, le jeudi et le vendredi, on remet le couvert pour des faims plus sĂ©rieuses. En fin de repas n’hĂ©sitez pas Ă  demander poire et reine-claude de Laurent Cazottes, Ă  la rubrique : les Rubis GnĂ´les.

Le Rubis, 14 rue LĂ©opold Bellan 75002 Paris – Tel 09 84 39 42 49. Ouvert du lundi au vendredi de 9h00 Ă  21h30, nocturnes jeudi et vendredi.

Bon ben alors qu’est-ce t’en dis? Si après ça on ne nous rince pas le nez correct lors de nos futures visites, ce sera Ă  dĂ©sespĂ©rer de tout, considĂ©rant qu’après tant de flagornerie il est Ă©vident que nous avons renoncĂ© au Prix Albert Londres qui pourtant nous tendait dĂ©sespĂ©rĂ©ment les bras.