« Agréments » des vins et variabilité des Terroirs

 

Par Lydia et Claude Bourguignon

Directeurs du LAMS -Ingénieur Agronome I.N.A.P.G.
Microbiologistes du Sol

Pour faire une réforme des agréments au sein des A.O.C, il faut tenir compte du rôle du sol dans l’expression des vins. Chaque sol, de chaque parcelle contient son propre mélange d’éléments nutritifs selon la roche sous jacente, selon la microflore et la microfaune qui habitent ce sol. Ceci est bien illustré dans un vignoble comme celui de la Côte- d’Or où le Pinot noir ne donne pas le même vin selon qu’il pousse sur le Clos de Bèze ou sur Richebourg. Les agréments doivent tenir compte de cette variabilité gustative des Terroirs. Si on accepte et si on reconnaît que la variabilité physique, chimique et biologique du sol d’un Terroir induit une variabilité gustative des vins alors on est obligé de reconnaître que le vin standard n’existe pas plus que le Français moyen d’1.70 m .

Le vin standard ne peut se concevoir que s’il est issu de raisins qui sont développés sur des sols agonisant, c’est-à-dire des sols qui ont perdu leur capacité à transmettre leur variabilité au vin. Accepter un vin standard c’est donc encourager le désherbage total et l’abus de pesticides. C’est donc contre le marché puisque les citoyens recherchent de plus en plus des vins naturels et que les politiques demandent aux viticulteurs de développer une viticulture durable. Le retour de l’histoire vers des sols vivants va donc à l’encontre du vin standard et va vers l’acceptation de la diversité.

Rénover les agréments dans le sens de l’histoire revient donc à favoriser la diversité des vins afin que celle-ci soit le reflet de la diversité des sols. Il ne s’agit alors plus de définir un vin standard mais justement d’éliminer ces vins standardisés et ceux qui ont des défauts rédhibitoires (piquettes, colle scotch, amertume excessive, absence de minéralité, etc.)

Les diatribes qui enveniment les discussions sur les A.O.C tirent leur origine d’un oubli historique. Lorsque Mr Capus a créé les A.O.C, il a pensé, pour faire respecter les usages locaux loyaux et constants, à mettre des limites juridiques sur l’emploi des cépages et sur les méthodes de vinification mais il n’a pas pensé à mettre un cahier des charges sur la gestion des sols viticoles. En effet, à cette époque la France viticole était encore paysanne c’est à dire qu’elle respectait son pays. Tous les sols de vignes étaient travaillés au cheval ou au bœuf et ils ne recevaient que du fumier ou du compost. Quand aux produits phytosanitaires ils se limitaient au soufre et à la bouillie Bordelaise. En un mot, tous les viticulteurs suivaient le même cahier des charges. Il n’est donc pas venu l’idée de Mr Capus d’édicter des règles sur la gestion des sols. Mais la guerre est passée et après elle sont arrivés le machinisme de plus en plus lourd et une chimie de plus en plus toxique.

Il est donc temps de définir un cahier des charges de la gestion des sols A.O.C.

Peut-on honnêtement considérer que des enjambeurs de 9 tonnes fassent partie des usages locaux loyaux et constants ?

Peut-on considérer honnêtement que le désherbage total et abus de systémique fassent partie des usages loyaux et constants ?

Peut-on considérer honnêtement que les défonçages et « dérocage » fassent parie des usages locaux loyaux et constants ?

C’est en se mettant autour d’une table et en définissant honnêtement et calmement un cahier des charges d’une gestion respectueuse des sols de nos Terroirs que nous pourrons réconcilier les viticulteurs et accepter comme critère d’agrément l’expression des Terroirs dans les vins A.O.C.

2 réponses à “« Agréments » des vins et variabilité des Terroirs”

  1. Jean-Louis (Cholet) écrit :

    Sylvie,
    J’aime beaucoup ce que tu peux écrire, de ci de là, et je suis très sensible au travail acharné que peut faire un Claude Bourguignon (le bien nommé), et si la volonté d’un nombre grandissant de gens est de consommer intelligent, nature et propre, j’entend régulièrement, surtout de la bouche de vignerons travaillant en conventionnel ou en « raisonné » (j’insiste sur les guillemets), …, j’entend leur inquiétude sur l’abus de cuivre (métal lourd) fait par les vignerons travaillant en bio…
    Sylvie,
    Peut-on ouvrir un sujet là dessus, afin de tous nous éclairer.
    @ Bientôt, ici, là bas ou ailleurs!

  2. augereau écrit :

    Bravo ma cousine !

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