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Je n’ai pas encore lu « Eloge de l’excés » d’Emmanuel Giraud mais j’ai pratiqué. Enfin me semble-je.

vendredi 27 décembre2013

A l’approche d’un phénomène naturel exceptionnel, il y a des animaux qui pressentent l’évènement et anticipent. L’homme a rarement la sagesse de les suivre et court souvent à sa perte.

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Il était prévu de longue date que la substantielle plus-value que nous avions effectuée en revendant deux bouteilles, dans un petit millésime, de deux premiers crus bordelais achetés à vil prix serait réinvestie chez notre ami Christophe Dufau des Bacchanales à Vence. De trois, nous serions cinq pour finir, rejoints par Alex, échappé de trois semaines d’un régime qui aurait pu, sans nous, être bénéfique, et Bonaventure, jeune marié, futur père et déjà ancien buveur. Chacun avait amené quelques-unes de ses plus belles bouteilles, sachant qui serait présent, autrement dit qu’il n’y aurait pas de gougnafiers.

Je ne sais si ce fut un tremblement de terre imperceptible ou ce début de Parkinson qui fait que je suis obligé d’adopter dans la plus petite pièce de la maison une position impropre à mon sexe au risque de me faire tancer, mais ce matin-là, tout mon être m’a chuchoté qu’il serait malin de solliciter ma fiancée pour nous véhiculer, car ma météo personnelle annonçait un « avis de vins forts, très forts » qui pourrait, vus les protagonistes, atteindre des sommets rarement atteints, un tsunami bacchique.

Tout a commencé en extérieur par une séance de spiritisme collectif autour d’une bulle et s’est terminé par la version spiritueux autour d’une Cartagène 98 d’Olivier Jullien et robustos cubains. En cuisine, rien ne nous a été épargné. L’équipe, en l’absence de Christophe, nous a régalés comme rarement et, ayant à notre disposition une très large palette de flacons, dirigés de main de maître par François Chassaignon, sommelier des Bacchanales, il nous a été aisé d’accompagner chaque plat de la bouteille idéale. Joueurs dans l’âme, nous avons tenté à chaque fois de reconnaitre à l’aveugle le vin qui nous était servi. Le peu de confiance que j’accorde à mon palais se trouvait justifié par les résultats obtenus. UNE sur QUINZE. Nous n’en avons reconnu qu’une seule. Le niveau peut laisser songeur quant à notre talent de dégustateur. ( Ma fiancée parle plus volontiers de nous en tant que gus tâteurs ). Cette bouteille, je peux l’avouer, c’était une Mémé 2003. Comme quoi notre boussole nous ramène malgré tout à ce qui constitue notre terreau, le fondamental. Mémé, la famille, chacun de nous savait que l’on peut compter sur elle.Bon! Où en étais-je?

Cela devait bien faire cinq minutes, une demi-heure selon ma fiancée, que mon téléphone vibrait quand, sérieux comme des papes, nous sommes descendus sur le parking. Il semblerait, selon les commérages, que le spectacle que nous offrions, était des plus drôles. Angèle et Lucile avaient devant elles cinq types hilares qu’elles devaient charger et livrer sur la vieille banquette en teck où nous dégusterions du bout des lèvres avant de nous séparer un champagne, vieille mise de La Closerie, un Overnoy 96, un Chaffardon Isidore 2007 et une autre excellente bouteille, dont j’ai oublié le nom. En fin de compte, je m’aperçois avec l’âge que mon problème n’est pas le foie comme le laisse supposer la faculté, mais bien plutôt ma mémoire. Même pas fichu de me souvenir du nom des 19 bouteilles que nous avons bues. Quelle misère!

Les Bacchanales Р247 Avenue de Provence Р06140 Vence РT̩l : 04 93 24 19 19

 

Les dessus de Table. La Galerie du Miam

mardi 16 avril2013

Il ne suffit pas de stocker la matière, multiplier les repas, en amonceler les photos, encore faut-il avoir du goût, et franchement ce n’était pas gagné. (suite…)

Mon cinquième joker.

vendredi 5 avril2013

« L4-L5 : coulés!… Si vous voulez vous en sortir, commencez par perdre 5/6 kg et après on en reparle »… Mon vétérinaire n’est plus mon ami. Hasard, les éléments féminins de ma grotte sentant arriver le printemps venaient de reprendre ce drôle de rituel, une sorte de jeûne, enfin ce truc que certains appellent « régime ». La méthode, la chrono-nutrition, était réputée non violente et efficace. Bon ben… je vais prendre ça. Donc depuis 5 semaines, je trempe des miettes de pain ensevelies sous des blocs de fromage dans mon bol dès l’aurore. Le repas commence et s’achève sur un unique plat où chaque bouchée est soigneusement mastiquée, espérant ainsi en doubler le volume. Ce genre d’expérience est vite perçue comme une punition si rien n’est prévu pour une escapade de temps en temps dans le champ d’à côté. Le tortionnaire qui a mis cette méthode au point doit bien le savoir, qui a effectivement prévu une incartade hebdomadaire. Il s’agit donc de bien choisir son dérapage, pas question de faire tourner le compteur pour une broutille, l’événement se doit d’être grandiose car rare.

J’ai donc choisi la venue dans le quartier de Mimi, car il possède un coefficient exagérateur très intéressant, ne pas le choisir aurait été une grossière erreur de casting, rien qu’à sa vue c’est le kilo assuré.  Et puis je me voyais mal lui annoncer : »Écoute! Mimi!…heeeu.. d’accord on mange ensemble mais, … je me limiterai à un filet de poisson avec une courgette bouillie et un verre d’eau » L’homme n’est pas réputé violent mais il y a des grossièretés que sa morale réprouve. Pour être bien certain de l’incidence de ma future dérive, j’avais pris soin de me peser le matin même. 84.500kg. Une socca fine et croustillante avec ce qu’il faut d’huile pour se préparer le gosier à recevoir les premières rafales de « Frileuse 2010 » de la Maison Puzelat. Pour mon retour à la vie, j’avais commandé à ma fiancée un osso-buco avec carottes, céleri-rave et anchois, le tout arrosé d’un trait de citron, le gras de la moelle tempérant l’acidité de l’agrume, quelques pâtes fraiches et pour commencer le superbe Chenin 2008 du Domaine Montrieux d’Émile Hérédia. Vite englouti, j’ai eu soudainement envie du Brouilly 2010 de Georges Descombes, une confiserie pour grande personne. Un joli plateau de fromages et l’inévitable Savagnin de Jean-François Ganevat puis, pour vérifier le calage des dents de sagesse, une tarte aux pommes arrosée de ma dernière bouteille de Tout’en Bulles du Domaine Gramenon de Aubéry Mother and Son.

Et puis comme on était bien, vraiment bien, Mimi a sorti, tel un magicien, deux robustos rapportés de sa dernière visite à Raul et Fidel. Quand la soirée devient sérieuse, je fais appel aux produits de la Distillerie Cazottes et comme je possède tous ses alcools et sur plusieurs millésimes pour mes incontournables : Reine-Claude dorée et Poire Williams et puis Mauzac rose et aussi le Prunelart ainsi qu’une rarissime bouteille de marc de Mémé distillé par Laurent. Il nous aura bien fallu le temps de déguster un D4 et un Cohiba pour vérifier la remarquable évolution de ses eaux-de-vie. A peine ballonnés, nous nous sommes retirés chacun dans nos appartements et ce n’est qu’au petit matin, après ma douche, qu’une fois sur la balance j’ai pu constater ô combien dormir fait grossir. Hallucinant! J’avais pris deux kilos en six heures de sommeil. Amis! Restez vigilants, ne dormez pas trop et méfiez-vous des cures quelles qu’elles soient.

Une expérience de l’eau de là

lundi 16 juillet2012

Je ne sais pourquoi certaines fois, heureusement rares, je me dis dès le placement à table : « Mais P…! Kéno t’es vraiment trop c..! Tu le savais et tu as accepté!…Tu ne la ramènes pas, tu t’escamotes dès que possible en t’excusant de partir si tôt mais tu te lèves à 4h et vieux comme t’es, tu ne le supportes plus, bla bla bla…. »

…. »Bon alors : Raphaël entre les deux André, Luc en face d’Alain et toi Philippe, ici à côté de moi!…. Comme mon petit bristol vous l’annonçait, je vous ai réuni ce soir pour que nous évoquions le mystère de l’eau et subséquemment son concept inhérent : »S’il est soluble dans le vin, Dieu l’est-il dans l’eau? »….Et afin d’éclairer nos esprits et pour être en osmose parfaite avec notre thème, nous allons accompagner notre végétal repas d’une sélection d’eaux minérales! »…. Cela devait bien faire vingt minutes qu’Enthoven parlait, je voyais en surimpression apparaitre les mots-clés de son discours et je ne comprenais toujours rien. Pourtant Finkielkraut et Glucksmann avaient bien tenté de me l’introduire mais décidément je n’arrivais pas à intégrer ce concept. Bien trop gros pour un si petit QI. Ferry et Comte-Sponville atterrés se demandaient ouvertement ce que je faisais là parmi eux. Puis l’image s’est brouillée, tout est devenu flou autour de moi, je changeais de monde, à mesure que leurs voix s’évanouissaient dans le néant surgissait de ce brouhaha une voix qui me paraissait familière et amicale.

Il a souvent été dit par ceux qui ont vécu cette étrange expérience que seule leur farouche envie de vivre les avait sauvés du néant qui les appelait au bout de ce tunnel éblouissant. Mon désir de vivre fut, ce jour-là, le plus fort. D’un filet ténu, la voix devint plus précise et je finis par discerner quelques bribes significatives ou du moins suffisamment évocatrices pour que je revienne à la vie. Car il s’agit bien ici d’une expérience mystique à laquelle j’ai participé bien malgré moi. Cette voix disait : »Philippe, réveille toi sinon t’auras pas de saint jacques à la crème et le jero de Mémé 90 est presque vide, alors tu arrêtes ta sieste et tu te pointes à table! »

Décidément on n’échappe pas à son destin et vouloir absolument se démarquer du commun des épiciers en regardant exclusivement Arte ne me vaut rien.